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Pour intégrer pleinement les pères dans les politiques publiques et les services à la famille, il faut que les décideurs développent le réflexe paternité dont avait parlé Yolande James, alors ministre de la Famille, lorsqu’elle a reconnu officiellement le Regroupement pour la Valorisation de la Paternité en 2011. Le réflexe paternité consiste à s’assurer que les mesures de soutien aux familles du Québec sont inclusives des pères et qu’elles les rejoignent effectivement.

Raymond Villeneuve, directeur général du Regroupement pour la Valorisation de la Paternité, a d’ailleurs écrit un texte sur le réflexe paternité qu’il est possible de consulter dans le dossier web sur les pères et les politiques publiques de l’Observatoire des tout petits.

Vous pouvez vous-mêmes analyser une mesure de politique publique en utilisant l’outil créé par le Regroupement pour la Valorisation de la Paternité qui vous permettra de vérifier si la mesure est inclusive des réalités paternelles. Pour cela, il faut analyser si les pères sont présents dans toutes les dimensions de cette politique : 1) dans le vocabulaire utilisé; 2) dans les objectifs; 3) dans les moyens de mise en œuvre; et 4) dans les effets. Pour télécharger l’outil, vous pouvez cliquer sur le bouton plus bas.

Exemples d’application du test

Pour vous permettre de mieux comprendre comment utiliser le test, le Regroupement pour la Valorisation de la Paternité a analysé quatre politiques publiques : le régime québécois d’assurance parentale (RQAP), le Plan d’action ministériel en santé et bien-être des hommes (PAMSBEH), le programme de Services intégrés en périnatalité et petite enfance (SIPPE) et la Stratégie gouvernementale pour l’égalité entre les femmes et les hommes : vers 2021. Vous trouverez plus bas les exemples d’analyses suivantes :

  • Assurance parentale
  • Plan d’action ministériel en santé et bien-être des hommes
  • Programme service intégré en périnatalité et petite enfance
  • Stratégie gouvernementale pour l’égalité entre les femmes et les hommes

Assurance parentale

En vigueur depuis le 1er janvier 2006, le Régime québécois d’assurance parentale (RQAP) constitue un moyen concret, pour les travailleuses et les travailleurs, de mieux concilier leurs responsabilités familiales et professionnelles. Il vise à soutenir financièrement les parents d’un enfant nouvellement né ou adopté, à les encourager dans leur désir d’avoir des enfants et à les soutenir dans leur volonté de consacrer plus de temps à leurs enfants. Le RQAP prévoit le versement de prestations à toutes les travailleuses et à tous les travailleurs admissibles – salariés et autonomes – qui prennent un congé de maternité, un congé de paternité, un congé parental ou un congé d’adoption.

Dimension
Analyse
Conclusion
Vocabulaire
Le régime québécois d’assurance parental (RQAP) est inclusif des mères et des pères du Québec dans le vocabulaire employé et utilise spécifiquement le mot paternité, entre autres, dans l’expression congé de paternité.
OUI
Objectif
La loi sur l’assurance parentale prévoit expressément le versement de prestations de maternité, de paternité et parentales accessibles à l’un ou à l’autre des parents.
OUI
Moyens de mise en œuvre
Les moyens de mise en œuvre, par exemple le formulaire d’inscription au régime, permettent aux pères de s’inscrire au programme et de recevoir des prestations parentales.
OUI
Effets
Le congé de paternité rejoint plus de 70 % de l’ensemble des pères et le congé parental est utilisé par 26 % de l’ensemble des pères. Le RQAP rejoint donc effectivement les pères et le défi est maintenant d’accroître le nombre de semaines prises par les pères, qui demeure nettement inférieur au nombre de semaines prises par les mères.
OUI
Réforme de 2020
Le RQAP a été réformé en 2020 et un bonus au partage du congé parental a été instauré (4 semaines de plus dans la banque de congés du couple lorsque les deux conjoints prennent au moins 8 semaines de congé parental). Cette mesure est positive mais, vraisemblablement, ne rejoindra qu’une minorité de pères. Un accroissement du nombre de semaines du congé de paternité aurait permis de rejoindre la majorité des pères.

Plan d’action ministériel en santé et bien-être des hommes

Le Plan d’action ministériel en santé et bien-être des hommes (PAMSBEH) du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) repose sur des orientations et des actions qui visent, globalement, à mieux rejoindre la population masculine par des stratégies de promotion et de prévention, à adapter les services pour en améliorer l’accès et répondre aux besoins des hommes; ainsi qu’à améliorer la compréhension des dynamiques masculines et les pratiques pour répondre aux besoins des hommes. Le PAMSBEH est accompagné d’un financement de 31 M $ sur cinq ans (2017-2022).

Dimension
Analyse
Conclusion
Vocabulaire
Le PAMSBEH utilise distinctement les mots hommes et pères. Cela permet de cibler précisément les objets qui s’adressent à la clientèle masculine et qui visent spécifiquement à la dimension de la masculinité qu’est la paternité.
OUI
Objectif
Les objectifs du PAMSBEH visent l’ensemble des hommes et ne ciblent pas spécifiquement les pères. Le PAMSBEH contient cependant cinq actions qui visent directement les pères. Cette précision fait en sorte que des actions ont été mises en place afin de rejoindre spécifiquement, par exemple, les pères de milieux défavorisés, les pères ayant de jeunes enfants, les pères ayant besoin d’hébergement.
OUI
Moyens de mise en œuvre
Les acteurs concernés par le PAMSBEH doivent produire des plans d’action afin de se donner des cibles et des indicateurs de résultats pour rejoindre les hommes et les pères. Le ministère de la Santé et des Services sociaux effectue un suivi de la mise en œuvre du PAMSBEH et coordonner le déploiement du plan d’action.
OUI
Effets
Le cadre de reddition de comptes du PAMSBEH permet de vérifier l’atteinte des objectifs fixés et de mesurer, au moins en partie, les effets obtenus. Les organismes communautaires qui ont reçu des sommes pour soutenir les pères en difficulté doivent effectuer une reddition de compte au programme de soutien aux organismes communautaires (SOC) du MSSS. Les autres organisations mobilisées par le PAMSBEH sont aussi tenues de rendre compte au MSSS des actions réalisées pour soutenir les pères.
OUI

Programme de services intégrés en périnatalité et petite enfance (SIPPE)

Les services intégrés en périnatalité et petite enfance (SIPPE) du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) ont pour objet de favoriser le développement global des enfants de 0 à 5 ans vivant en contexte de vulnérabilité par des services de promotion et de prévention individualisés, précoces, intensifs et de longue durée. Les objectifs généraux des SIPPE s’inscrivent en cohérence avec cette cible et se déclinent selon trois orientations : 1) améliorer l’état de santé des bébés à naître, des enfants, des femmes enceintes et des parents se trouvant dans une situation qui les rend vulnérables; 2) favoriser le développement optimal des enfants se trouvant dans une situation qui les rend vulnérables; 3) améliorer les conditions de vie des parents et des enfants se trouvant dans une situation qui les rend vulnérables.

Dimension
Analyse
Conclusion
Vocabulaire
Le vocabulaire utilisé dans le Programme de Services intégrés en périnatalité et petite enfance (SIPPE) est inclusif des pères puisqu’on y retrouve les mots mères, parents, pères, partenaires et familles.
OUI
Objectif
Les objectifs du programme sont rédigés en termes généraux et incluent les parents. Le modèle logique du programme, son cadre de référence, ses cahiers de formation intègrent toutefois explicitement les pères. On peut donc conclure que les objectifs, bien que généraux, sont effectivement inclusifs des pères.
OUI
Moyens de mise en œuvre
La fiche de périnatalité (fiche d’inscription au programme) ne permet pas l’inscription d’un père, même si celui-ci est monoparental. Les interventions effectuées auprès des pères peuvent cependant maintenant être compilées, et cela, depuis 2020. Il sera intéressant de prendre connaissance des données recueillies par le MSSS à ce sujet.
UN PEU
Effets
Les pères ne pouvant pas ouvrir une fiche à leur nom, les données à leur sujet ne sont pas disponibles et il n’est donc pas possible de connaître le nombre de pères qui sont rejoints mais, selon tout vraisemblance, ils sont peu nombreux à bénéficier d’un accompagnement. La compilation des interventions effectuées auprès des pères, possible depuis 2020, pourra fournir des indications à ce sujet.
UN PEU

Stratégie gouvernementale pour l’égalité entre les femmes et les hommes

La Stratégie gouvernementale pour l’égalité entre les femmes et les hommes : vers 2021 est d’une durée de cinq ans et poursuit les principaux objectifs suivants : 1) réduire les inégalités persistantes et préoccupantes; 2) agir en ayant la préoccupation de considérer l’ensemble des femmes tout en tenant compte de la dimension intersectionnelle; 3) mobiliser les femmes et les hommes pour qu’ensemble ils fassent progresser l’égalité de fait, et ce, dans tous les milieux et dans toutes les régions.

Dimension
Analyse
Conclusion
Vocabulaire
La Stratégie gouvernementale pour l’égalité entre les femmes et les hommes adopte une approche respectant les principes de l’approche différenciée selon les sexes (ADS). On utilise donc les termes femmes et hommes, mères et pères, tout au long du document et cela permet d’y viser spécifiquement les hommes et les pères.
OUI
Objectif
Le troisième objectif de la Stratégie inclut explicitement les hommes et souhaite les mobiliser afin, qu’avec les femmes, ils fassent progresser l’égalité de fait. Plusieurs actions de la politique ont pour cible d’accroître la coparentalité entre les mères et les pères, la valorisation de la paternité et le soutien à l’engagement paternel et intègrent donc explicitement les pères.
OUI
Moyens de mise en œuvre
Tous les moyens de mise en œuvre intègrent une approche différenciée selon les sexes et permettent de distinguer les hommes et les femmes, les mères et les pères.
OUI
Effets
Pour chacune des actions de la politique qui sont mises en œuvre, il existe des indicateurs de résultats très précis et il est possible de vérifier si les actions produisent les résultats désirés en tenant de leurs effets différenciés sur les femmes et les hommes, les mères et les pères.
OUI
Prochaine stratégie
Pour que la prochaine Stratégie gouvernementale pour l’égalité entre les femmes et les femmes soit encore plus inclusive des réalités paternelles, il faudrait que plus de mesures soutiennent activement la coparentalité et l’engagement paternel. Pour avoir des effets plus importants, il serait intéressant que cette politique publique vise certains groupes spécifiques de la population comme, par exemple, les pères immigrants, qu’elle examine des enjeux de société importants comme la conciliation famille-travail dans les milieux de travail à prédominance masculine, ou qu’elle mette en place des projets structurants, par exemple, dans la période périnatale, pour favoriser l’engagement précoce des pères.